Points et contrepoings

Un peu de résistance à la morosité ambiante lors de l’atelier d’écriture du mercredi 10 février ! Résistance en utilisant la force des mots et de l’imagination. Résistance aussi, en partageant nos rires. Alors vite un stylo et…haut les poings, haut les cœurs ! Il est toujours temps d’aviver les colères qui, elles, ne dorment jamais.

Nous voilà écoutant Arlette Laguiller lors d’une vieille allocution télévisuelle (1988). Tous les ressorts mis en œuvre pour l’accroche sont là :  engagement et clarté du propos, attaques en bonne et due forme, affirmation de son idéal, aphorismes cinglants… Belle entrée en matière pour appréhender l’écriture d’un discours puisque c’était là la 1ère proposition donnée au groupe !

La cause défendue par le discours pouvait être inattendue. En tous cas il fallait à chacun.e trouver la force de conviction dans l’adresse à son auditoire. Interpeler, attaquer, dénoncer, proposer ! Utiliser les phrases interjectives, affirmatives, cinglantes. Trouver le bon rythme bien sûr dans ce souffle fougueux. Une contrainte malicieuse avait été imposée : insérer dans son texte la phrase « On dit de moi que je dis toujours cela, toujours la même chose, eh bien figurez vous que j’en suis fière » (2mn38)

Ci-dessous 2 beaux appels virulents à résister ! 
En sortant, s’évadant pour Jean-Luc et par les mots, la poésie pour Hélène D. :

 

« Chers ami(e)s

Chères compagnes et compagnons

Le temps est venu.

Le temps est venu pour vous de pouvoir enfin exister.

Exister, quel mot sublime !

Qui, parmi vous, mes très chers amis, n’a pas désespéré de ne jamais en sortir ?

Sortir, quel mot délicieux !

Nous y reviendrons…

Et si l’un ou l’une d’entre vous n’a jamais eu cette tentation, cette peur même, de se laisser aller au désespoir, qu’il me demande alors de me taire.

Et je me tairai.

Se taire, quel mot terrible !

Si l’espoir que je veux vous soumettre avait une odeur, ce serait celle de l’ail. Oui, l’odeur piquante et troublante à la fois de l’ail. Si cet espoir était un geste ou un mouvement, ce serait un pas en avant, un grand pas en avant.

Un pas en avant, quelle expression audacieuse !

Non, très chères compagnes et très chers compagnons, les jeux ne sont pas faits.

Il faut croire que certains avaient cru le contraire. Assignés à résidence depuis des mois, ils semblaient s’être résignés. Résignés à rester chez eux, entre quatre murs, des murs presque sans fenêtres.

Pourtant, le temps est venu, très chers ami(e)s, le temps est venu pour vous de décider.

Décider, quel mot essentiel !

Il vous faut décider, décider de sortir.

Voilà, l’espoir est lâché !

Sortir.

Sortons, sortez. Échappons-nous, échappez-vous.

Bien sûr, j’entends déjà tous ceux et toutes celles qui se sont finalement accommodés de cet isolement forcé.

Tous ceux et toutes celles qui se sont auto-confinés avec leurs écrans, leurs minuscules habitudes, leurs petits rituels, leur sécurité étouffante et leurs illusions perdues.

Je les entends, ceux-là, proclamer que je dis toujours la même chose. Eh bien, figurez-vous que j’en suis fier.

Aujourd’hui, mes très chers amis, je vous demande de ne plus rester enfermés et isolés.

Aujourd’hui, compagnes et compagnons, je vous demande de SORTIR !

Il y a de la place, beaucoup de place.

Sortir.

Partir sur les chemins, entre les pages des livres, dans les forêts, entre les lignes d’écriture.

Marcher dans les dunes, le long des plages, sur la crête des montagnes.

Dormir, dormir dans les cabanes, dormir en haut des arbres. Dormir dans des endroits secrets.

S’évader, parcourir, cheminer, avancer, découvrir, explorer.

Pour ne plus rester seul, mes très cher(e)s ami(e)s, il vous faut SORTIR ! »          JEAN-LUC

 

 

« À vous qui voulez exister et résister sur les chemins buissonniers pour chacun et avec tout un chacun.
À vous qui ne voulez plus du mépris, des sourires dédaigneux lancés du haut des bureaux de là-haut

À vous qui souhaitez entrer en résistance avec vos mots, vos plumes, vos guitares, violons, tambours, ou trompettes, vos voix encres rouges, encres bleues.

À vous mais surtout avec vous et comme vous

je veux dire Assez !

Assez d’une fausse paix sociale achetée au prix de sacrifices sur l’autel des uns contre les autres.
Assez des camps, des clans, des tromperies et des faux-semblants.

Nous n’avons rien à attendre des chiffres.
Ne nous faisons pas d’illusions, un chiffre ne dira jamais autant de possibles qu’un mot, qu’un acte, qu’une promesse, qu’un poème même.

Avouons-le…. Qu’aimons nous avoir en tête ? Des chiffres ou des lettres ?

À vous qui êtes du côté des lettres, de l’Être 

Faites en sorte que les chiffres et les tableaux s’élèvent à la puissance DIS

Dis, dites ce qui vous traverse, ce qui vous bouleverse, et crions avec culot ces mots de traverses, au dessus des cols et des vestes retournées.

Passons les murailles des dossiers aux langues de bois

Écrivons et crions au-dessus des dossiers aux langues d’émois.

On dit de moi que je dis toujours cela, toujours la même chose eh bien figurez vous que j’en suis fière.
Alors oui amis des mots et des nous, soyons fiers en vers et contre tous de lever nos voix en chantier, nos voix enchantées et en pensées.
Ensemble aujourd’hui pour deux mains levées.

Levons les camps, élevons les voiles des rallumeurs d’étoiles.
Que les poèmes des saltimbanques inondent et retissent la voie lactée de nos vies dévidées et assignées. À résistances. Toujours et tout le temps, partout et par tous les temps… »        HÉLÈNE D.